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Tu sais quoi ? Hier, j’ai entendu un truc de dingue à la radio. Alors j’ai été vérifier sur Google News. Et certains articles relataient la même info. Il y avait même un hashtag sur Twitter qui confirmait la viralité de cette folie grandissante. Il paraît, mais promets-moi de ne pas te moquer de moi, il paraît donc que nous vivons, que nous sommes bien tous vivants. C’est la rumeur de vivre !

Je te l’avais dit, c’est dingue. Pour toi aussi, je te vois froncer les sourcils. Pourtant, il n’y a aucun doute, le ciel nous est tombé sur la tête. En plus, ça ne date pas d’hier. Le ciel nous est bien tombé sur la tête. Et nous, les Terriens, on était aussi tous tombés sur la tête. Mais là, c’est le comble, c’est le pompon, j’avais « jamais encore rien » n’entendu d’aussi absurde. Et en matière d’absurdité, nous les Terriens, on s’y connaît !

Vraiment, on ne sait plus quoi inventer comme Fake News. Tout ce qu’on veut, c’est faire du buzz. Le hic, c’est quand on entend des trucs pareils, on flippe. J’ai vraiment peur. Faut que je me calme.

Alors bizarrement, tu vois, j’ai rallumé la radio au risque d’entendre une autre fois cette rumeur de vivre. Mais là, plus de news, juste la même chanson qui passe en boucle. Comme si plus rien ne se passait dans le monde, comme si plus rien d’autre n’existait.

C’est bien ça, ce n’est qu’une rumeur. Dis-le moi au moins toi mon ami, ce n’est qu’une rumeur. C’est un hoax, je vais aller vérifier sur hoaxbuster. Mais que se passe-t-il, c’est cassé, les liens ne fonctionnent plus.

Les rires de mon ami m’interrompent dans mon discours.

Pourquoi tu rigoles ? La situation est grave.

Alors qu’il ne peut pas s’empêcher de pouffer, je le vois qui tend son index pour me montrer le calendrier. On est le 1er avril !

Tout s’explique. Ils ont fait quand même vachement fort cette fois-ci. Là, ils sont allés encore plus loin que le galactique gag d’Orson Welles en 1938 : sa plus fumante mystification. Parce que des extra-terrestres qui débarquent pourquoi pas, l’univers étant tellement immense que ce n’est pas si improbable. Mais là, vivre, faut pas délirer, ça se saurait ! J’suis pas tombé de la dernière pluie. Enfin, forcément un peu quand même, puisque ne serait-ce que cinq minutes, j’suis tombé dans le panneau. 

Vivre, et puis quoi encore. Avec toutes les conneries qu’on fait ! N’allons pas chercher bien loin, n’allons même pas chercher chez les autres : dans d’autres pays, d’autres familles, d’autres religions, d’autres cultures. Non, regardons-nous nous-mêmes, là dans le miroir de notre salle de bains, pas celui du voisin, le nôtre. Allez, je vous le prouve. J’y vais. Y’a pas de doute, y’a rien de vivant. Le miroir suffit, pas besoin d’un microscope.

Mickaël Jackson l’avait compris depuis longtemps. Regardez « Thriller ». C’est ça, un artiste. Il nous montre ce que nous sommes et ce que nous deviendrons si on ne change rien. Un artiste, c’est un vrai astrologue, un incontestable devin. Il nous lance sans arrêt des messages et nous, on met des plombes à le comprendre. Ah si on était tous des artistes, on serait peut-être encore tous vivants.

Mais là, de toute façon, avec les intelligences artificielles, on a trouvé une solution bien commode. On se fait greffer une IA et on se croit vivant. Le tour est joué. Alors qu’on fait rien d’autre que remplir une coquille vide. Ah la rumeur de vivre, elle me fait bien rire maintenant. Je n’ai plus peur et j’ai envie de fêter ça. On va faire sauter les bouchons de Champagne et de Prosecco pour tous. On célèbre la fin de la rumeur de vivre.

Mais mon ami s’en va. Il a fini sa pause et il doit retourner bosser. Il avait un rendez-vous important. Je me retrouve seul devant deux bouteilles et un verre. C’est ridicule, je devrais plutôt avoir une bouteille et deux verres. Ouais, mais non, si c’était le cas, je serais vivant. Quel con ! Je ne vais pas m’y mettre aussi à croire et à propager une telle insanité. 

Self-control Denis, reprends tes esprits. Alors je rallume la radio et toujours cette même chanson. Piano, voix, atmosphère prenante, émouvante, intense, puis qui se renforce avec la batterie et une guitare électrique planante qui semble te porter dans un autre monde. Peut-être une autre Terre. Il y en a tellement.

Et là, on retrouve le gag galactique du sieur Orson Welles, mais inversé. C’est nous les extra-terrestres. On débarque sur une autre planète habitée. Et là, leurs habitants ne rigolaient pas du tout. Parce que nous les Terriens, on fait vraiment peur ! Pas pour notre arsenal et pour nos gadgets électroniques. Non, on leur fout les jetons parce qu’on a tué la vie. Dans cette discipline, on n’est pas champions du monde, on est champions de l’univers ! C’est pour ça que ce n’est pas bon de propager la rumeur de vivre. Si la nouvelle traversait par mégarde l’espace intersidéral, ils auraient vraiment envie venir chez nous. Mais là, comme ça, on est tranquilles. Aucun risque de les voir arriver.

Non, c’est mieux qu’on reste chacun chez soi à s’occuper de nos propres affaires. On n’a pas besoin d’un regard extérieur.

Tiens, j’ai trouvé des podcasts. C’est clair, ils le disent tous à Paris, à Rome, à Bagdad, à Alexandrie, à Athènes, à New-York, à Machu Picchu, à Saint-Pétersbourg, à Tokyo, à Pékin, etc. La rumeur de vivre se diffuse, la rumeur de vivre gonfle. Elle sera bientôt plus grosse que notre planète, plus grosse que Jupiter, plus grosse que le soleil, plus grosse que Proxima du Centaure, plus grosse que la Voie lactée qu’Andromède, plus grosse que Eta Carinae et Uy Scuti réunies (voir la vidéo ci-dessus) et que les milliards de milliards d’étoiles et de galaxies, plus grosse que l’univers. C’est sûr, la rumeur va finir par exploser. Je dois me rendre à l’évidence. Elle explose, les ondes se propagent, c’est un Big Bang tonitruant. Le Big Bang !

La vie est enfin née, n’en faisons plus une rumeur.

A la radio, on entend encore parfois cette chanson. 

Son titre : Sky (from « LOVE » by Dramagods / Nuno Bettencourt – Steve Ferlazzo)

Catégories : storytelling

Denis Gentile

Je suis un passant. Ici et maintenant, je suis un passant du web. Le Passant est celui qui va d'un lieu à l'autre, d'un sentiment à l'autre, il n'est jamais le même. Je passe d'une page à l'autre, d'un blog à l'autre, d'un message à l'autre. Et ces pages, ces blogs et ces messages, je les passe aux autres passants qui y passent à leur tour :) Plus prosaïquement, je suis un Storyteller, Blogueur & Rédacteur Web. Mais le rôle que je préfère, c'est celui de Digital Storyteller !

2 commentaires

Guy · 2 avril 2019 à 7 h 55 min

Et Oui! on vit!
On vit plutôt bien!
On vit nos passions et nos rêves !
On vit aussi nos coups de gueule !

    Guy Couturier · 24 juillet 2019 à 21 h 06 min

    C’est complètement fou cette « rumeur de vivre », et je ne soupçonnais rien ! Wow !
    Hier soir je suis allé au ciné, voire « Yesterday » : c’est l’histoire d’un médiocre chanteur de Rock qui se fait renverser par un bus, pendant qu’une coupure générale d’électricité touche le monde entier, pendant 10 minutes. Quant il sort de l’hôpital il joue à sa petite amie plusieurs airs des Beatles, qui trouve les morceaux magnifiques, elle lui demande quand il les a composés? Il lui répond qu’ils ne sont pas de lui, mais des Beatles, celle-ci lui répond qu’elle ne connait pas ce groupe, d’autres de ses amis (musiciens) lui font la même réponse, personne ne semble connaître les Beatles ! il saute sur Google et là aussi les Beatles ne figure nul part.
    En fait la coupure de courant avait effacé des mémoires toutes traces du groupe (et bien d’autres aussi). Avec ses souvenirs de guitariste il « recompose » les airs célèbres des Beatles. Il devient une super star mondiale. Cependant au cours d’un concert, en direct il avoue au public sa supercherie, et met tous ses morceaux (ceux des Beatles) en téléchargement libre sur Internet, et annonce qu’il ne chantera plus et retourne enseigner la musique aux enfants, dans le collège de son village et retrouver sa petite amie (prof de maths) qui n’avait pas voulu le suivre dans sa quête de la célébrité.
    Le grand moment du film c’est qu’il est accompagné des plus grandes chansons des Beatles…d’ailleurs dans la salle il n’y avait que des cheveux blancs !

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